Photographes animaliers

Mathieu LATOUR

2023 : Mathieu Latour se lance dans un grand projet : "Regards d'extinction"

2023 : "Odyssée animale", exposition de photo du 9 juillet au 27 août, Odyssea, St Jean de Monts

Rappel

Avril 2019 : AG de Ré Nature Environnement, Dominique Chevillon, son président, se lève : "j'aimerais vous présenter un jeune photographe talentueux qui nous aide beaucoup, nous donne des photos pour illustrer nos interventions ou les revues locales : Mathieu Latour"!

Effectivement, un tout jeune homme se lève et durant quelques minutes nous raconte son - court mais déjà rempli - parcours : son arrivée dans l'île à 4 ans, ses études, son école de photo, ses envies, ses désirs, sa passion pour les oiseaux notamment, ses balades à leur rencontre.

On ne reste pas indifférent face à de tels propos : nous décidons de l'interroger afin qu'il nous en dise plus sur qui il est, ce qu'il fait. C'est l'objet de ce profil!

 

Entretien avec...

Votre Parcours en quelques mots ? Je m’appelle Mathieu Latour, j’ai 21 ans, et je suis photographe animalier. Je suis né à Paris mais j’en suis partis à l’âge de 4 ans pour l’ile de Ré. J’ai passé toute mon enfance là-bas à explorer la nature, les insectes et les oiseaux. C’était ma passion mais aussi un mode d’évasion de la vie humaine. J’ai la chance d’avoir des parents qui aime voyager et chaque fois que nous partions en voyage je cherchais toujours de nouveaux animaux sauvages à observer. Le besoin de découvrir le vivant était si intense que je savais que j’allais en faire mon métier. Et puis mon père a été mon premier pas dans la photographie car il prenait toujours des photographies d’animaux durant nos voyages et un jour j’ai voulu l’imiter. A 7 ans j’ai reçu mon premier appareil photo et au fil des années, mes appareils, tout comme mes photos, se sont améliorés. Durant mes années au lycée, j’ai fait la rencontre du photographe rétais François Blanchard qui m’a appris tout ce qu’il savait sur la patience et la photographie d’oiseaux. Dès lors, j’ai fait mon chemin en rencontrant Dominique Chevillon et Ré Nature Environnement mais aussi en travaillant pour le journal rétais Ré à la Hune en tant que rédacteur d’articles sur la biodiversité rétaise.Après l’obtention de mon baccalauréat, je suis parti vivre à Paris pour commencer mes études de 3 ans dans la photographie à l’école d’art et design Condé dans le 15earrondissement. J’y ai appris tout ce qu’il me fallait pour la retouche d’image sur logiciel et l’expérience de travailler en studio notamment. Depuis, je multiplie les voyages et les rencontres pour continuer à faire vivre ma passion tout en la faisant partager aux autres.

Quels sont vos maîtres à penser, vos références culturelles ?  Mes premières influences et références sont avant tout les naturalistes et biologistes du monde, en particulier ceux qui font des documentaires animaliers. L’une de mes idoles est le docteur Brady Barr,

herpétologue qui a travaillé pendant des années pour National Geographic en parcourant le monde et découvrant les crocodiles, serpents et autres animaux fascinants. D’une certaine manière, c’est en partis son travail qui m’a fait encore plus aimer les animaux aujourd’hui. Après, j’ai également plusieurs photographes que je trouve extraordinaire par leur travail avec la nature. Mais de tous, deux photographes se démarquent :

- Tim Flach (présent sur faunesauvage.fr) qui m’inspire pour ses portraits d’espèces menacées pleins d’émotions et dégageant un sentiment d’égalité entre l’homme et l’animal

- Tim Laman (présent sur faune sauvage.fr) pour ses clichés dans les forêts tropicales montrant l’importance de l’animal dans son habitat.

Photographer Tim Laman stands waist to chest deep in a mangrove lagoon with his big lens on a tripod to photograph birds in the mangroves. Photo by Zafer Kizilkaya.

Pourquoi la faune  sauvage ? J’ai toujours été passionné par les animaux sauvages certainement parce que je m’y suis plongé dès ma plus tendre enfance. En voyant des images dans les livres et en regardant des documentaires à la télé, je me demandais toujours si c’était réel et non des créatures fantastiques imaginaires. Et lors d’une visite au zoo de Thoiry j’ai vu que tout cela était vrai et ma passion est née. Venir vivre sur l’ile de Ré était une chance car c’est là que j’ai commencé à observer mes premières espèces sauvages (oiseaux et insectes) tout en continuant d’en apprendre un maximum. Le goût du voyage m’a permis de découvrir de nouvelles espèces et m’a aussi montré l’importance de sauvegarder ces créatures extraordinaires dont certaines sont au bord de l’extinction. Je pense que les animaux sont un moyen de m’évader de la vie humaine et de me rappeler la splendeur du monde vivant qui ne finit pas de me surprendre. Sans les animaux le monde ne serait ni vivant ni magique je pense.

(Mathieu Latour)

Si vous étiez un animal sauvage, lequel ? Si j’étais un animal, je serais un Aigle royal car pour moi les oiseaux sont le symbole de la liberté par leur vol. Voler c’est pouvoir aller là où l’on a envie sans que personne ne vous donne d’ordre. L’aigle est de plus au sommet de sa chaine alimentaire et en tant que rapace, il a toujours été pour moi symbole de noblesse et de force tranquille

Une ou deux belles rencontres de faune sauvage ? Ma plus belle rencontre s’est déroulée sur l’ile de Ré quand j’avais 16 ans. Je photographiais les oiseaux depuis quelques années et je cherchais désespérément à trouver le hibou moyen-duc. Alors un couple d’ornithologue a réussi à m’en trouver une famille dans un cupressus poussant dans les marais au printemps. J’ai été surpris car je connaissais l’endroit mais jamais je n’aurais imaginé voir des hiboux dans cet arbre, comme quoi on peut toujours passer à côté de quelque chose à la fois invisible et merveilleux. Dès notre arrivé, nous avons trouvé le couple avec leur 3 petits. L’excitation était au rendez-vous tout comme ma joie de voir pour la première fois un hibou sauvage me fixant de ses gros yeux oranges. J’y suis retourné plusieurs fois et à chaque face à face, les petits m’observaient étonner comme un jeu de regard entre l’homme et l’oiseau. J’en n’oubliais presque que c’était un simple rapace nocturne car pour moi c’était comme rencontrer une créature fantastique et imaginaire qui devient réel tout d’un coup. C’était aussi la preuve qu’il m’était possible de rencontrer n’importe quel animal rare et sauvage sur Terre s’y j’y m’étais de la patience et une envie de ne jamais abandonner ma passion et ma détermination.

Votre / vos lieux de nature préféré ?  En France, l’ile de Ré est un lieu parfait pour l’observation et la photographie d’oiseaux. Les oiseaux y sont très nombreux et on a une diversité d’espèces reproductrices unique. J’aime passer des heures dans les marais salants à observer le comportement des oiseaux aquatiques ou rester planquer sous un filet en forêt à guetter le nourrissage des jeunes rapaces. Sur cette ile, on se détache du naturel et on peut faire des rencontres différentes toute l’année sans jamais se lasser.

Concernant le reste du monde, j’ai un faible pour les forêts tropicales de Bornéo. On y découvre une faune mystérieuse, rare et très riche qui ne vit nulle part ailleurs. Je pourrais passer des heures à parcourir la jungle à la recherche d’orangs outans, de nasiques et de toute sorte de serpent. On peut passer une vie à Bornéo sans jamais voire deux fois la même chose. C’est d’autant plus triste de savoir que cette forêt risque de disparaître à jamais à cause des plantations de palmiers à huile qui détruise chaque jour cette biodiversité fragile.

Le lieu mythique où vous rêvez d’aller ? (sur terre ou ailleurs). Pourquoi ?  Sur Terre, je rêve de pouvoir me rendre dans le parc indien de Jim Corbett à la recherche du tigre qui reste à jamais mon animal préféré. De plus c’est un animal que je souhaite protéger via des reportages photos car je ne peux imaginer voir les générations futures grandir dans un monde sans tigre, le plus beaux et le plus majestueux des prédateurs. Et surtout je voudrais par des images, que les gens comprennent que voir un tigre dans la nature est une expérience plus forte que de le voir dans un cirque derrière les barreaux.

Ailleurs, je ne vous cache pas je passerais bien une année sur la planète Pandora du film Avatar. James Cameron y a imaginé tout dans les moindres détails. Que ce soit la faune extra-terrestre, la flore bioluminescente et les paysages vastes et gigantesques, l’univers d’Avatar est le paradis pour tous ceux qui aime la photo en forêt avec des espèces uniques et spectaculaires (dommage que l’air y soit irrespirable pour nous).

L’œuvre (une des vôtres ou celle d’un autre qui vous semble illustrercle mieux votre parcours ? Pourquoi ? Le livre de Tim Flach « Endangered » est l’une de mes plus belles sources d’inspirations. Les portraits d’animaux y sont d’une telle intensité qu’ils paraissent presque exprimer leurs sentiments. De plus, il s’agit de photographies d’espèces en voie de disparition allant des mammifères aux coraux en passant par des oiseaux et autres encore. La diversité du monde vivant y est mise en valeur, traduisant des émotions réelles dans le regard des animaux.

Quel matériel utilisez-vous ? Je travaille avec un NIKON D610 capteur plein format (obligatoire pour une très bonne définition d’image). Mon objectif principal reste le 150-600 mm SIGMA (idéal pour la photo animalière) et il n’est pas rare que j’utilise un doubleur de focale surtout quand les animaux sont très loin de moi. J’utilise aussi un 90 mm TAMRON pour la macrophotographie et un 28-300 mm NIKON pour les animaux proches ou le paysage. Les jumelles NIKON, un flash COBRA et un trépied viennent compléter le tout. Pour l’approche et l’affût : une tenue de camouflage, une tente et un bon filet.

Et vos techniques de rencontre avec l’animal sauvage,? Ma technique préférée reste l’approche, mais cela passe avant tout par une longue phase de repérage. Le plus important est toujours de ne pas ou peu déranger l’animal. Parfois il faut simplement s’assoir et attendre que le sujet s’habitue à la présence humaine et avec de la chance on réussit de belles images. L’affût reste, néanmoins, indispensable pour prendre certaines espèces comme les oiseaux au nid. Mais il faut acquérir beaucoup de patience car dans chaque sortie affût je reste au minimum 4 heures dans ma tente.

J’apprécie particulièrement la photographie d’animaux en contre-jour pour créer des effets d’ombres chinoises ou de vol d’oiseaux irréels. J’arrive aussi à m’adapter à la météo. Ainsi par temps nuageux, je photographie surtout les oiseaux en vol en me servant des nuages comme d’un fond blanc.

(Mathieu Latour)

Un conseil au débutant dans votre activité, que lui diriez-vous ? Le plus important dans la photographie animalière c’est la PATIENCE. Photographier les animaux sauvages est un exercice très difficile en particulier s’y l’on veut faire de très belles images. Il faudra parfois passer plusieurs heures sans réussir une image. Mais avec de la persévérance et de la détermination, on y arrive toujours. Il faut toujours respecter l’animal et son environnement (ne pas être dominant sur les autres espèces) et des connaissances naturalistes sont indispensables. En effet, savoir connaitre son sujet est une tâche délicate et importante pour anticiper ses réactions et ainsi réussir de bons clichés.

Un animal disparu revient, lequel ? Le loup de Tasmanie car c’est une espèce fascinante qui pourrait coexister avec la biodiversité australienne. Pour l’animal fantastique je pense que j’aurais bien aimé photographier les dragons et leur mode de vie s’ils existaient.

Une initiative prise ou à prendre en faveur de la faune sauvage ? Trouver un moyen d’arrêter l’huile de palme qui détruit les plus belles forêts du monde tout ça pour faire des biscuits et de la pâte à tartiner qui fait grossir. Le Nutella est-il plus important que la survie des orangs outans ? A voir. Informer les enfants et leur famille sur les conditions réelles de fabrication de Nutella et sur la disparition des espèces que cela entraine est capital.

Une urgence pour la faune sauvage, pour la vie sauvage ? Pourquoi ? Je pense qu’il faut être plus sévère sur les sanctions contre le braconnage et le trafic des animaux car sinon cela continuera et on s’exposera à une catastrophe. Des actions comme tuer des rhinocéros pour leurs cornes et extraire de la bile d’ours est monstrueux et il faut que cela soit plus sanctionner. Et également abolir la chasse sportive sur les espèces protégées et menacées. Je dirais bien en plus trouver une solution rapide et efficace contre le plastique dans les océans mais je pense que ce combat est trop compliqué à gérer.

Une association qui vous tient à cœur ? Kalaweit est pour moi la meilleure association de protection des grands singes à Bornéo et Sumatra. Chanee (le directeur) y fait un travail remarquable en rachetant des hectares de forêts pour les protéger de l’huile de palme et permettre un avenir meilleur pour les orangs-outans et les gibbons.

Pour conclure, vous disparaissez ce soir, qu’aimeriez-vous laisser comme message aux autres ? Soyez respectueux envers toutes les créatures vivantes, ne tuez pas pour le plaisir de la chasse sportive, faites attention aux produits que vous consommez et ne perdez jamais de vu que le monde est magique et vivant grâce aux animaux.

Merci à faunesauvage.fr pour m’avoir donné la chance de m’exprimer sur ma passion et de la faire découvrir aux autres. Continuez à montrer au monde l’étendue des richesses naturelles de notre planète bleue.

Distinctions & Parutions

Expositions

"Odyssée animale", Palais des Congrès Odyssea, Saint-Jean de Monts, 9 juillet-27 août 2023

« La biodiversité des villages rétais », l’Ancre Maritaise à Sainte-Marie de Ré pour le mois de l’environnement 2019

« Regard d’extinction », 30 Portraits de face d’espèces en voie de disparition : le 27 juin à l’école de Condé, Rue de Cambronne à Paris, et du 29 juin au 9 juillet au salon de la photo au bois plage en Ré

27 juin à paris

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