Chasse des oies migratrices après la fermeture : le cadeau de trop d’Emmanuel Macron aux chasseurs

Le gouvernement vient de prolonger la chasse des oies tout au long du mois de février, après la date officielle de fermeture, en pleine période de migration prénuptiale. « En même temps » la France  prétend être exemplaire en matière de biodiversité, se vante d’accueillir l’IPBES(1) à Paris fin mars et le Congrès mondial de l’UICN en 2020 à Marseille.

C’est le cadeau de trop fait aux chasseurs après la réduction du prix du permis national pour les plus riches, le retour des chasses présidentielles et autres piégeages traditionnels. La LPO a d’ores et déjà saisi le Conseil d’Etat avec une demande de suspension immédiate.

Alors que les gouvernements précédents avaient tenté sans succès d’autoriser la chasse des oies migratrices jusqu’au 10 février, le gouvernement d’Emmanuel Macron offre aux chasseurs tout le mois de février !

Sur ordre du Président de la République, le Ministre censé incarner la Transition Ecologique et Solidaire vient de signer un arrêté le 30 janvier 2019  permettant  la chasse de 4000 Oies cendrées jusqu’au 28 février 2019 (sauf Haut-Rhin/Bas-Rhin), et des Oies rieuses et des moissons, sans quota, jusqu’au 10 février.

Ainsi le Ministère prétend avoir analysé, en moins d’une semaine, les 52 000 contributions sur le site de la consultation publique sur le site du ministère de l’Ecologie pour établir son arrêté. En vérité, la décision était prise dès le mois d’août dernier, puisque le Président de la Fédération nationale des chasseurs déclarait à la sortie de sa rencontre avec le Président Macron (celle-là même qui avait conduit à la démission de Nicolas Hulot) qu’il avait obtenu la possibilité de chasser les oies cendrées au mois de février 2019. Dès lors on ne peut s’empêcher de se demander à quoi servent les consultations publiques !

En résumé, qu’importe si l’argument présenté par le Ministère ne tient pas puisqu’il n’y a pas de dégâts causés aux cultures par ces espèces en France. Après tout les précédents gouvernements avaient déjà tenté de justifier la chasse après la fermeture pour des raisons scientifiques (sic), ou donné des ordres à la police de la nature de ne pas verbaliser les chasseurs.

Qu’importe si le Président de la République qui se dit européen convaincu méprise la Directive oiseaux approuvée par la France il y a 40 ans qui dit que les Etats membres ne doivent pas chasser les oiseaux migrateurs de retour sur leurs lieux de nidification.

Qu’importe si 11 arrêts concordants du Conseil d’Etat ont confirmé, année après année, que la date de fermeture des oies sauvages doit être le 31 janvier afin de respecter la migration prénuptiale des oiseaux qui débute, selon les études les plus récentes, à partir du 20 janvier (et de plus en plus tôt avec le réchauffement climatique).

Qu’importe si les chasseurs sont bien incapables de distinguer les trois espèces d’oies après le 10 février, s’agissant pour grande partie d’une chasse de nuit, et si les contrôles sont fatalement limités notamment par les faibles effectifs des agents de l’ONCFS

Qu’importe si ce mois de chasse supplémentaire perturbera les autres oiseaux d’eau dont la chasse est fermée depuis le 31 janvier, et notamment les canards, en cette période de quiétude qui leur est indispensable entre la fin de l’hivernage et leur reproduction. Et qu’importe si la faune est fragilisée par les conditions météorologiques hivernales.

Sous prétexte de « gestion adaptative » présentée comme un véritable progrès dans le projet de loi consacrant la fusion de l’ONCFS et de l’AFB en cours d’examen, le gouvernement commence par prolonger la chasse d’oiseaux migrateurs en dehors des périodes d’ouverture, au lieu de suspendre la chasse des 18 oiseaux en mauvais état de conservation et inscrits comme tels sur les listes rouges de l’UICN, reniant ainsi les engagements de campagne du Président de la République.

La LPO vient de déposer deux recours au Conseil d‘Etat contre cet arrêté, l’un visant son annulation et l’autre, plus urgent, demandant sa suspension immédiate.

(1) Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques : ouvert aux états membres des Nations-Unies (130 membres en 2017).