Dans l’Ouest américain, les chasseurs de grizzlys veulent ressortir leurs fusils

L’animal a été retiré de la liste des espèces protégées en 2017, mais ses défenseurs s’opposent par tous les moyens à la réouverture de la chasse. L’affrontement est aussi un combat entre deux cultures.

Regard perçant, visage émacié, casquette vissée sur le crâne, Loren Grosskopf est un chasseur. A 69 ans, ce partisan de Donald Trump nous donne rendez-vous à l’hôtel Irma, propriété historique de William Cody, alias Buffalo Bill. L’homme qui tua, selon la légende, 4 282 bisons lors de la conquête de l’Ouest et fonda la ville qui porte son nom dans le Wyoming. Loren Grosskopf est de cette veine des pionniers : il détient plus de 25 armes, dont trois carabines de chasse, et expose chez lui 85 trophées animaux.

Clou de la collection, un Brown Bear, grizzly géant de 3,20 mètres de haut tiré en Alaska en 2005. Il rêvait d’ajouter un dernier trophée, un grizzly de Yellowstone, région sauvage qui s’étale sur le Wyoming ainsi qu’une partie du Montana et de l’Idaho.

Mais un juge fédéral en a décidé autrement : jeudi 13 septembre, il a suspendu pour deux semaines la chasse au grizzly, qui devait s’ouvrir début septembre, comme il l’avait déjà fait fin août. Grosskopf, qui est membre de la commission grizzly du Wyoming, ne décolère pas.

« Ce n’est pas le job d’un juge. Il n’est ni biologiste, ni scientifique et n’a pas participé aux travaux de protection de la nature depuis quarante ans. »

Depuis plus de vingt ans, le Wyoming, état conservateur vaste comme la moitié de la France mais cent fois moins peuplé (570 000 habitants), veut retrouver le droit de chasser le grizzly, protégé depuis 1975. Il ne restait alors que 138 individus sur le territoire des Etats-Unis (hors Alaska). A force d’effort de protection, leur nombre est remonté à près de 700. Suffisamment pour que l’espèce ait été retirée de la liste fédérale des espèces protégées mi-2017 – le processus fut engagé sous Barack Obama et achevé sous Donald Trump – et pour que le Wyoming organise sa première campagne de chasse à l’automne 2018….

voir le Monde (Arnaud Leparmentier) du 15 septembre