Loup en Charente maritime : suite aux articles deSud-Ouest, la LPO réagit à des « suppositions » de destruction de brebis

Monsieur le Directeur (deSud-Ouest),

Même s’il prenait la peine de rappeler que le loup est une espèce protégée, le Communiqué de presse de la Préfecture de Charente-Maritime signalant la présence de cette espèce en Charente-Maritime (voir ci-dessous) nous a paru particulièrement maladroit. Le traitement qui en est fait par votre journal aussi. Outre le fait que cette communication est anxiogène dans le choix des mots retenus, mettre en relation le passage d’un loup avec une attaque sur des moutons est malhonnête. Certes la prédation sur des troupeaux ovins par des loups est possible et avérée dans bien des cas. Mais cela nécessite des expertises conduites par l’ONCFS. Dans ce cas, cette dernière répond qu’elle n’a aucun élément dans ce sens. Et les indemnisations sont conséquentes, bien au-delà des tarifs concernant les attaques par des chiens.

La probabilité aujourd’hui que ce soit une attaque par un loup plutôt que par des chiens est quasi nulle.

La France est, selon un récent rapport, le Pays qui tue proportionnellement le plus de loups, qui a les plus mauvais résultats en terme d’attaques de troupeaux, et à qui cette politique coûte le plus cher.

Les départements des Deux-Sèvres et des Charentes sont ceux qui accumulent le plus de prédation sur les ovins de la part des chiens. C’est dans un article de Sud-Ouest en 2015 que l’on pouvait lire :

« La dernière attaque officielle remonte à fin août, sur les hauteurs de Souché, aux portes de Niort. Quatre brebis agonisantes avec des traces de profondes morsures. C’est ce qu’ont découvert Yann et Amandine, les éleveurs, quand ils sont entrés dans leur champ. Une semaine plus tôt, dans le même secteur périurbain, c’est Claude Morin, un autre éleveur de brebis, qui retrouvait cinq de ses bêtes entre la vie et la mort. Les chiens, toujours les chiens. Et si on remonte encore un peu dans le temps, on trouve trace de 40 moutons tués à Sanxay, chez Francis Pierre, fin mars, quelques semaines après des raids à Azay-sur-Thouet, Le Tallud, Ménigoute et Vasles, surnommé «le village mouton». Il ne fait pas bon sommeiller dans le bocage des Deux-Sèvres quand on a la laine bouclée et la chair bien tendre.

 «La prédation est importante, très importante même, mais impossible à quantifier de façon précise. Car, la plupart du temps, les attaques ne sont pas déclarées. Les chiens sont identifiés, et ça se règle entre voisins. L’éleveur est indemnisé de la main à la main. Je ne suis alerté qu’au cas où il faut faire intervenir l’assurance», explique Harold Bucher, salarié du syndicat d’élevage ovin.

2200 bêtes tuées en 2014

Cinquième département français pour la taille du cheptel avec 180.000 têtes, les Deux-Sèvres ont beau se situer bien loin des alpages où rôdent loups et ours, la situation y est tout aussi tendue que dans la vallée des Merveilles ou sur les pentes du Gélas, dans le Mercantour.

En 2013, Groupama, principale compagnie d’assurances, a dû rembourser 2500 pertes de brebis tuées par des chiens et, en 2014, 2200 (1). Éric Guignouard, qui s’occupe principalement de ces dossiers à Groupama, note aussi 2014 attaques en Vendée en 2014 et 1080 en Charente-Maritime, les départements voisins. Des chiffres qui sont à rapprocher des 2000 têtes indemnisées dans les Alpes-Maritimes. Mais, dans le bocage du Centre-Ouest, cela ne concerne que les éleveurs adhérents du syndicat ovin et assurés par Groupama. Le vrai chiffre de cette mortalité «accidentelle» peut être deux fois plus important.

 «Les chiens ont ceci de particulier qu’ils n’attaquent pas pour manger. Ils peuvent très bien avoir été nourris par leur propriétaire une heure avant et faire, malgré tout, un carnage dans un troupeau de moutons. Ils retrouvent leur instinct de prédateurs sans la nécessité de l’être. Et quand ils commencent à tuer, la panique qu’ils créent dans le troupeau leur

donne encore plus l’envie de tuer, surtout s’ils sont en meute. Un chien qui a tué une brebis recommencera à la moindre occasion», témoigne un vétérinaire de Parthenay.

«Sur ce plan-là aussi, ça se règle souvent sans intervention extérieure. Ou le propriétaire euthanasie lui-même son chien, ou c’est l’éleveur qui intervient lui-même au moment de l’attaque et sort le fusil. Dans un cas comme dans l’autre, personne ne sait rien», poursuit Harold Bucher. Sauf quand ce fut le maire de Ménigoute en personne qui se fit justice. C’était le 1eraoût 2014. Didier Gaillard entend de l’agitation dans son pré, sort son fusil et abat l’un des chiens. Explication: «Je défendais mon troupeau,

comme les éleveurs d’autres régions le font face aux loups…»

«J’y ai passé des nuits, avec un lance-pierres, à tenter de les effrayer. Mais ça ne sert à rien. Ils finissent toujours par venir quand on relâche notre vigilance. Ils passent sur la clôture et le mal est fait», se désespère Claude Morin, agriculteur à la retraite, qui n’était pas assuré.

«Je les ai vus. Trois chiens, deux petits et un gros. La première fois, ils venaient juste “d’embaucher”. Ils n’ont emporté que la laine. La deuxième fois, ils boulottaient une brebis encore vivante. La troisième fois, il y en avait cinq d’esquintées. L’une est morte, et je suis toujours en train d’essayer de sauver les quatre autres», poursuit le Niortais, qui a porté plainte au commissariat.

«Mais je sais bien que ça ne servira à rien. Si ça avait été des loups, comme dans les Alpes, on en aurait fait tout un foin. Mais des chiens, tout le monde s’en fiche. C’est pour ça que la plupart des éleveurs renoncent à réclamer. Ils enterrent leurs brebis crevées, et on n’en parle plus.»

«Les chiens jouent»

Le secteur le plus touché? La Gâtine, autour de Parthenay, terre bénie pour l’élevage de l’agneau AOC(2). Des milliers de prés bien verts, clôturés de haies, et des chiens de ferme qui battent la campagne et rentrent le soir manger dans leur gamelle.

«J’ai subi trois attaques en plusieurs années. Dont l’une avec un dogue de Bordeaux et un beauceron. Par rapport à d’autres, j’ai eu la chance de toujours pouvoir identifier les chiens. Donc, je n’ai pas eu de problème de remboursement par les assurances. Mais plus que les morsures causées par les molosses, ce sont les conséquences secondaires des raids qui sont difficiles à chiffrer: les clôtures arrachées, les brebis gestantes qui avortent en raison du stress, celles qui se noient, se cassent une patte, meurent de crise cardiaque quelques jours plus tard. En fait, les chiens jouent, et ils s’entraînent les uns les autres», raconte Loïc Parnaudeau, éleveur à Vasles. «J’ai pris l’assurance chiens errants. Ça me coûte 200euros par an, mais c’est devenu indispensable.»

Ainsi va la vie dans les pâturages des Deux-Sèvres. Loin du Mercantour ou des vallées ariégeoises, la peur rôde aussi quand le jour décline. Entre chien et loup.

(1) Le remboursement peut aller de 91 à 552euros selon que les chiens ont été identifiés ou pas, qu’il s’agisse d’une simple brebis, d’une brebis pleine, allaitante ou d’un bélier.

(2) Appellation d’origine contrôlée.

 À force de crier au loup, on en oublierait presque que son cousin domestique provoque plus de dégâts dans les troupeaux de moutons Dans le bocage, les loups sont des chiens

PRÉDATEURS INSOLITES »

La LPO a elle-même un cheptel ovin sur les terrains qu’elle gère. Et nous sommes régulièrement victimes d’attaques par des chiens.

Tout ceci pour vous dire que nous trouvons l’information telle qu’elle est traitée par la Préfecture et relayée par Sud-Ouest, avec des couvertures particulièrement inquiétantes, et les liens faits avec une attaque de moutons 15 jours auparavant partiale.  Pourquoi ne pas avoir demandé auparavant de signaler toutes les attaques faites par des chiens ?!

Seriez-vous disposé à nous ouvrir vos colonnes pour donner un autre éclairage ?

Bien cordialement

 Yves VERILHAC, Directeur Général LPO

 

La LPO est le représentant officiel de BirdLife International en France

 

COMMUNIQUE DE PRESSE

La Rochelle, le 21 novembre 2019

Le mercredi 20 novembre après-midi, un grand canidé a été pris en photo, trottant à proximité de parcelles de vigne sur la commune de Saint-Thomas de Conac, au sud-ouest du département.

L’observateur a transmis la photographie et plusieurs détails à l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage qui l’a authentifié comme étant celle d’un loup gris (Canis lupus lupus).

Cet évènement est à rapprocher de la confirmation par la mairie de Mortagne ce jeudi 21 novembre, de la découverte de brebis mortes il y a une quinzaine de jours sur la ferme bio de la gravelle qui était restée inconnue jusqu’à ce jour, sans que l’ONCFS soit dans la capacité d’affirmer le lien entre les faits en raison des délais.

L’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage dispose d’un maillage territorial d’agents spécialement formés à la reconnaissance des indices de présence du loup et aux expertises de constats d’attaques sur animaux sauvages ou bétail domestique, y-compris dans la totalité des départements de la région Nouvelle-Aquitaine où la présence de cette espèce protégée est occasionnelle.

L’ONCFS poursuit ses investigations pour déterminer l’origine de cet animal et collecter des informations qui pourraient permettre de le localiser.

Toute observation suspecte de grand canidé ou tout constat d’attaque sur animaux sauvages ou bétail domestique doivent être rapidement signalés au service départemental compétent de l’ONCFS (Service départemental de Charente-Maritime : 05.46.74.95.20 – sd17@oncfs.gouv.fr).

Il est rappelé que le loup est une espèce protégée.

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Service départemental de la communication interministérielle
Cabinet du préfet
Préfecture de la Charente-Maritime