Personnalités à découvrir

VERILHAC Yves

Directeur général de la LPO depuis 2014, successeur de Michel Métais - 36 ans de vol! - Yves Verilhac nous a reçu pour évoquer son parcours, ses passions, sa sensibilité à la nature qu'il a très forte. Il l'a mise désormais au service de l'association, forte d'un siècle d'engagement,  plus de 45 000 adhérents5 000 bénévoles actifs400 salariés sur le territoire national et d'un réseau d'associations locales actives dans 79 départements.

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Mon Petit Duc rasta en plein lotissement

"Mon petit duc!"

Votre Parcours en quelques étapes clé ? J’ai rejoint un club nature à l’âge de 10 ans, en 1970. C’était le groupe des naturalistes de la moyenne vallée du Rhône. Une antenne du CORA le centre ornithologique Rhône-Alpes. Par occupation avec le baguage des oiseaux ? Par passion de la contemplation ? Par goût de la solitude ? Par envie de protéger les plus faibles ? Par goût du jeu avec ce plaisir d’observer des blaireaux sans qu’ils s’en rendent compte ?

YV mouettes et Fort BoyardA 21 ans je suis recruté comme attaché scientifique de la FRAPNA par Philippe Lebreton alors Président. Etude des changements écologiques, sociaux et économiques en Dombes à le demande de Jean Untermaïer alors directeur de l’Institut de droit de l’environnement, inventaire du Parc du Pilat, lutte contre le canal Rhin-Rhône, combat pour le retour du Lynx… Chargé de communication et d’animation (poste Fonjep) je coordonne la parution de 10 posters recomposant les différents milieux naturels : étangs et lacs, marais et tourbières, rivières et fleuves…. Un succès mondial traduit jusqu’au Japon.

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Le Président du Grand Lyon fait appel à moi pour intégrer son Cabinet de 1991 à 1995. Rédaction de la première charte d’écologie urbaine, développement de la collecte sélective, protection du Rhône et de ses annexes en amont (3000 Ha à Miribel Jonage contre un projet de méga plan d’eau et complexe touristique/ Feyssine contre le projet Villa Urbana de Charles Hernu) comme en aval (Ile de la Table ronde).

Ni encarté, ni franc maçon, ni fonctionnaire, m’étant fait beaucoup d’ennemis en particulier dans la majorité du Maire de l’époque, je suis éjecté. Mon désert est ardéchois : chargé de la création du Parc naturel régional des Monts d’Ardèche pendant 6 ans, j’en deviens directeur et le reste 4 années durant.

Puis c’est le groupement d’intérêt public Aten que je dirige 8 années durant : formation, professionnalisation, mutualisation des outils et méthodes des 5000 salariés des espaces naturels protégés (Parcs nationaux, réserves naturelles, Conservatoires, Parcs Naturels Régionaux, Grands Sites, Natura 2000…).

J’occupe le poste de Directeur Général de la LPO (160 salariés, 400 en France) depuis 3 ans déjà.

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Quels sont vos maîtres à penser, vos références ? Flaubert lorsqu’il écrit en 1867 : « […] Je me suis pâmé, il y a huit jours, devant un campement de Bohémiens qui s'étaient établis à Rouen. Voilà la troisième fois que j'en vois. Et toujours avec un nouveau plaisir. L'admirable, c'est qu'ils excitaient la haine des bourgeois, bien qu'inoffensifs comme des moutons. Je me suis fait très mal voir de la foule en leur donnant quelques sols. Et j'ai entendu de jolis mots à la Prud'homme.

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Cette haine-là tient à quelque chose de très profond et de complexe. On la retrouve chez tous les gens d'ordre. C'est la haine que l'on porte au Bédouin, à l'hérétique, au philosophe, au solitaire, au poète. Et il y a de la peur dans cette haine. Moi qui suis toujours pour les minorités, elle m'exaspère. Il est vrai que beaucoup de choses m'exaspèrent. Du jour où je ne serai plus indigné, je tomberai à plat, comme une poupée à qui on retire son bâton. […] ».

Après « Bédouin, hérétique, philosophe, solitaire, poète… » j’entends « Loups, cormorans, vautours fauves, renards…. ».

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J’ai lu plusieurs fois Don Quichotte de Cervantès. Je m’y retrouve aussi. Tout comme Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand lorsqu’il lui fait déclarer « Que dites-vous ?... C'est inutile ?... Je le sais ! Mais on ne se bat pas dans l'espoir du succès ! Non ! Non, c'est bien plus beau lorsque c'est inutile ! ».

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Pourquoi j’ai mangé mon père de Roy Lewis m’a également marqué. Avec ce personnage conservateur qui essaye d’empêcher la maitrise du feu, au nom de l’écologie… J’aime l’auto critique y compris de l’écologie.

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Le livre « Ici on a aimé les juifs » m’a aussi beaucoup marqué. Il me parle de mes origines, le Chambon sur Lignon (plus précisément le Mazet Saint-Voy) en Haute-Loire. De cette terre de résistance. De cette capacité à se faire son propre jugement. A résister au pouvoir central.

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Moi le rhodanien j’ai évité de citer notre maître à tous Robert Hainard…. Trop facile ! J’ai tellement passé des heures à observer les castors sur les lônes du Rhône…

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Pour finir, je dois dire que la musique m’a marqué autant si non plus que la littérature : Brassens, Ferré et Brel. What else !?

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Pourquoi la faune / l’animal sauvage, la vie sauvage L’autre, la différence, la liberté, cette force et cette faiblesse à la fois. Des moments furtifs d’infinie richesse. Voir un renard muloter me remplit me bonheur. Tout gamin, j’ouvrais délicatement les taupinières puis je restais des heures à l’affut en attendant de voir la taupe venir refermer sa galerie. Contrairement à une idée trop répandue, notamment par les thèses de Darwin, l’évolution n’est pas guidée par la seule compétition : sans solidarité au sein d’une même espèce, mais aussi et surtout entre les différentes espèces, aucun ne survivrait.

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Si vous étiez un animal sauvage, lequel? Quand même, l’un de ces grands rapaces, busard ou circaète pour planer ! Euh non plutôt un Cincle plongeur pour marcher au fond de l’eau. Quoique, un rossignol pour le chant ! Une loutre ou un dauphin pour le jeu…

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Une ou deux belles rencontres avec la vie sauvage ? A l’affut au castor, sur le bord du Rhône, assis sans bouger depuis des heures. Un rat arrive, me passe sur les jambes sans se rendre compte de rien. J’ai gagné, je suis partie intégrante de la nature !

Un moment furtif : je suis à l’affut devant un terrier que je pense être de blaireau. La nuit tombe. Le silence se fait. D’un coup, un renard apparait, regarde à droite et à gauche, puis part. Ça n’a duré qu’une seconde ou deux. L’ai-je rêvé ? Peu importe.

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Vos lieux de nature préférés ? Les plateaux du massif central balayés par les vents. Le Mézenc, l’Aubrac, le Cézallier…. Avant qu’ils ne nous mettent des éoliennes n’importe comment et n’importe où…

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Le lieu mythique où vous rêvez d’aller ? Punta Arenas. Le sud de l’Argentine et du Chili. Des terres extrêmes. Parce ce que j’y suis passé, en coup de vent, et qu’il n’y a rien de plus frustrant !

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L’œuvre qui vous semble symbolique de vos actions ? Le film Barry Lyndon de Stanley Kubrick. L’aventure, les hauts et les bas, et la place de la musique ! Ou Mon oncle benjamin de Claude Tillier qui a donné ce film rafraichissant avec Jacques Brel.

Comment je me vois

"Comment je me vois!"

Quel matériel utilisé pour vos activités de nature ? J’ai arrêté la photo lors du passage de l’argentique au numérique. Je n’ai pas réussi à passer le pas. J’aimais attendre le facteur qui me livrait ma pellicule développée de Kodak (pas Fuji trop jaune à mon goût surtout pour rendre un pouillot ou un hypolaïs !). Et découvrir les ratés, les flous… Un peu comme une loterie.

DSC_0481 Et vos techniques de rencontre avec l’animal sauvage ? A l’affut à la tombée de la nuit. J’aime assister à cette transition entre le jour et la nuit. Comment les sons diminuent. Avec comme un regain juste avant le basculement dans l’ombre. Les chants intermédiaires des rapaces nocturnes qui arrivent très tôt. Le roulement de l’engoulevent. J’aime l’idée que la nature vienne à moi. Pas l’inverse.

Un conseil au débutant dans votre activité ? Un seul mot : la contemplation. Les collectionneurs : "circulez il n’y a rien à voir !"

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Un animal disparu revient, lequel ? Le Dodo. Disparu et fantastique à la fois. Pas besoin d’inventer il y a tout au-delà de l’imagination humaine.

Une initiative prise ou à prendre en faveur de la faune sauvage ? Mettre fin au piégeage en France : glu, matole, pierres… on écrase, on colle, on enferme, on torture. Des oiseaux familiers aux blaireaux. Plus de 20.000 blaireaux tués chaque année en France métropolitaine. Au moins 400.000 renards ! Mais dans quel pays et à quelle époque vivons-nous ? Là-dessus on utilise des produits chimiques pour tuer les micro-mammifères !? Cherchez l’erreur. Et les Shadocks pompaient, pompaient… Rien n’a changé depuis que je lisais la Hulotte dans les années 70.

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Une urgence pour la faune sauvage ? Changer nos habitudes alimentaires. Le système ne changera pas par vertu. Nous consommateurs avons la possibilité de lui tordre le bras en mangeant beaucoup moins de viande, en achetant des légumes et fruits de saison, en favorisant les circuits courts.

Une association qui vous tient à cœur ? La LPO pardi !

Pour conclure, vous disparaissez ce soir, qu’aimeriez-vous laisser comme message aux autres ? 

Une phrase de Prévert qui nous rappelle à notre condition : « Tais-toi chose imprécise appelée à disparaître »

Humour dans un cimetière

 

 

 

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