Saisi par One Voice et d’autres associations comme la LPO, le Conseil d’Etat classe les martres de la liste nationale des ESOD et déclasse 26 espèces dans les départements.« ESOD ». Derrière ces quatre lettres se cache une réalité cruelle et violente : 18 espèces décrétées indésirables et des dizaines de milliers d’animaux massacrés chaque année. En 2023, l’État dressait la liste macabre des 9 espèces du groupe II , prises pour cible département par département : renards, martres, fouines, belettes, geais des chênes, pies bavardes, étourneaux sansonnets, corneilles noires et corbeaux freux… Près de 500 classements, fondés sur des critères archaïques et dépassés. Aujourd’hui, le Conseil d’Etat nous donne en partie raison avec une décision historique. Il retire les martres de cette liste de la honte partout en France, et prononce 26 retraits dans les départements !
26 classements jugés illégaux et les martres retirées de la liste partout en France
Pour ces animaux harcelés, la vie n’est qu’un combat pour échapper aux fusils et aux pièges. En plus de la chasse et des battues administratives , ils peuvent être massacrés par les propriétaires quasiment toute l’année. Et quand les balles ne sifflent pas, il y a les pièges qui mutilent et qui tuent, les cages qui se referment avant qu’un piégeur finisse le travail au fusil, à l’arme blanche ou à la main . Les ESOD ne sont pas les seules victimes, à l’image de Cooper , Collier Rouge ou Tigrou et de tous les animaux familiers blessés, parfois mortellement.
Dès sa publication, nous avons attaqué l’arrêté qui prononçait près de 500 classements partout en France. Aujourd’hui, le Conseil d’Etat confirme que des dizaines d’entre eux étaient illégaux. Dès maintenant dans ces départements et jusqu’au 30 juin 2026, les animaux de ces espèces n’auront plus à subir ce harcèlement permanent. Pour les martres, la victoire est totale : c’est leur présence même sur la liste, partout en France, qui est remise en cause.
ESOD : une logique obsolète sur la sellette
Depuis des années, et comme nos partenaires associatifs, nous dénonçons le caractère infondé et absurde des critères utilisés pour fixer cette liste. Aucun animal n’est mauvais par nature et aucune espèce ne mérite d’être harcelée. Il est grand temps d’abandonner ces réflexes d’un autre âge et de prendre conscience de tout ce que nous apportons ces animaux, à l’image des renards , qui se nourrissent de surmulots et freinent la propagation des maladies, comme la maladie de Lyme. Et parce que les animaux ont le droit de vivre pour eux-mêmes tout simplement.
Avec cette décision, le Conseil d’Etat confirme un peu plus que cette logique ne tient plus. Décrié par certains services de l’Etat lui-même , le régime des ESOD ne tient plus qu’à un fil. Nous maintiendrons plus que jamais la pression pour qu’il soit définitivement remis en cause, en continu d’exiger une réforme radicale de la chasse ! Et nous poursuivrons le combat pour tous les animaux encore classés.
Les espèces retirées de la liste des ESOD par le Conseil d’Etat :
- Martres : partout en France ;
- Fouines : Aveyron, Morbihan et Territoire de Belfort ;
- Renards : Aveyron, Haute-Loire et Lozère en dehors des zones où il est susceptible d’occasionner des dégâts ;
- Corbeau freux : Nord et Pas-de-Calais ;
- Corneilles : Alpes-de-Haute-Provence, Hautes-Alpes, Aveyron, Bouches-du-Rhône, Haute-Loire et Vaucluse ;
- Tartes bavardes : Ariège, Charente, Haute-Garonne, Gers, Maine-et-Loire, Somme et Essonne ;
- Étourneaux sansonnets : Corrèze, Meurthe-et-Moselle et Meuse ;
- Geais des chênes : Corrèze et Lot-et-Garonne.
Pour la LPO :
Néanmoins, la belette demeure encore et toujours classée ESOD dans le seul département du Pas-de-Calais, fief du président de la Fédération nationale des chasseurs, en raison de sa prétendue abondance et des risques qu’elle voudrait peser sur les activités agricoles…
Cette décision intervient alors que les préfectures vont prochainement préparer leurs demandes de classement ESOD pour la période 2026-2029 lors des Commissions départementales de la chasse et de la faune sauvage ( CDCFS ). La prochaine triennale devra désormais tenir compte de cet arrêt du Conseil d’État et des derniers travaux scientifiques, notamment les rapports très critiques de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable ( IGEDD ) publiés respectivement en septembre 2023 et en février 2025 . La Stratégie nationale pour la biodiversité 2030 dévoilée le 20 juillet 2023 doit également faire évoluer les modes de gestion des ESOD, notamment par le biais d’un premier travail sur les mustélidés et le renard dès 2026, élargi aux oiseaux en 2029.
Pour Allain Bougrain Dubourg, Président de la LPO : « La destruction systématique d’animaux sauvages visant à limiter leurs impacts sur nos activités humaines est à la fois injuste et inefficace. Alors que la biodiversité connaît un effondrement dramatique, il n’est pas acceptable de perpétuer ce massacre inutile. La science et le droit ont tranché dans le bon sens. »
Photo : étourneau, ©JBDumond2024