Personnalités à découvrir

MACCHI Sylvain

Depuis 1995, Sylvain Macchi - Responsable zootechnique - travaille au Parc des loups du Gévaudan en Lozère. Passionné par cette espèce, qu'il a été voir et continue d'aller visiter aux quatre coins du monde, et qu'il aimerait mieux connue et mieux respectée et donc mieux protégée, il ne compte pas son temps pour sensibiliser le public - 100 000 visiteurs par an - à la connaissance de ce prédateur sauvage.

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Il nous reçoit dans la fraîcheur d'un matin de fin mai, avant l'arrivée du public, pour un moment de rencontre passionnant dans le parc où nous croisons 5 sous-espèces de loups dans la lumière douce avant que la chaleur ne monte et les fasse se cacher à l'ombre des talus et des buissons. Sylvain prend le temps de nous les présenter une par une, de nous raconter l'histoire du parc, sa propre histoire, ses voyages, sa passion qu'il sait partager.

Pendant la visite, les vautours - fauve et moine - nous accompagnent, attentifs aux nourritures délaissées par les loups.

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Rencontre...

Comment le loup est-il entré dans votre vie ? A la suite d’un article du Reader Digest, en 1980, par un américain qui avait acquis des loups en péninsule olympique (Nord-Ouest des USA, Etat de Washington) et qui cherchait quelqu’un pour poursuivre son œuvre. Il y a eu un déclic, je me suis dit « je veux être cette personne » !

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Rappelez nous les étapes principales de votre parcours ? Je travaille sur ce parc depuis 22 ans. Originaire de la région parisienne, j’ai eu la chance de rencontrer son fondateur, Gérard Ménatori en 1990. Et quand il a arrêté de travailler en 1995 (Gérard Ménatori est décédé en 1998, NDLR), j’ai commencé mon job ici. A l’époque, c’était le seul parc où il y avait des loups en semi-liberté (ou semi-captivité) avec la possibilité de les observer, de les étudier et, surtout, de faire passer un message.

Et, en parallèle, cela fait plus de 30 ans que je voyage sur la trace des loups dans l’hémisphère nord.

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 Sylvain Macchi devant ses photos glanées sur le traces du loup (photo JBDumond)

Comment concevez-vous votre travail? Ce qui m’a plus c’est de réhabiliter l’animal auprès du public. Car je ne pouvais me satisfaire de juste travailler au milieu d’animaux captifs, en provenance de zoos ou sauvés comme ceux de Mongolie récupérés en Hongrie par la Fondation Brigitte Bardot qui sont venus grossir en mars 1991 la première population du parc.

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Je voulais que tous ces loups captifs permettent de passer un message, de faire connaître le loup, et d’espérer ainsi que, peu à peu, les mentalités changent et qu’on soit à même d’accepter la présence aujourd’hui d’environ 350 loups sur le sol français.

Donc, un travail de pédagogie et de sensibilisation avant tout. Et déclencher des vocations éventuellement.

On reçoit des gens de toute couche sociale, des enfants – très important ! -, des groupes de chasseurs, d’éleveurs, une population confrontée possiblement à la problématique du loup. D’où un dialogue, un échange, une meilleure connaissance et des comportements vis à vis du loup qui peuvent évoluer grâce à ces visites.

Car il ne faut pas oublier que même si l’espèce est protégée par les conventions internationales, on a autorisé l’abattage de près de 40 loups cette année.

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 Sylvain Macchi, militant pédagogue au service du loup (photo JBDumond)

Quel est l’avenir du loup en France à votre avis ? Je ne suis pas très optimiste, mais on verra avec le nouveau gouvernement et les pressions qui s’exerceront.

Ce qui est dommage, c’est que chez nos voisins italiens, espagnols, portugais, ils ont des loups, des ours, des lynx en plus grande quantité et des troupeaux de moutons et que la cohabitation est possible ! Même si un loup est abattu ici ou là, il n’y a pas une volonté d’éradication de l’espèce.

En France, nous avons éradiqué le loup entre 1890 et 1930, et le lynx et l’ours dans les Alpes.

Donc, durant une soixantaine d’années, il n’y a plus eu de super prédateurs et les pratiques agropastorales ont changé. Dans le temps, les troupeaux étaient protégés par un triptyque: berger, chiens, regroupement nocturne. Avec la disparition du loup, on a laissé tomber la protection. Avec le retour, il a fallu recommencer la protection et c’est perçu par beaucoup d’éleveurs comme un retour en arrière.

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 Panneau pédagogique sur le pastoralisme (photo JBDumond)

Je pense qu’il faudrait faire l’effort de cohabiter et que si malgré les moyens mis en place, il y a un animal déviant, on l’élimine.

Vous avez quelques références qui vous ont guidé dans votre démarche ? Des gens qui ont compté dans votre vie. Je ne peux oublier Gérard Ménatori ! J’ai eu également la chance de rencontrer des grands spécialistes du loup, scientifiques, photographes (Jim Brandenburg), des gens compétents mais humbles et ouverts aux partages des connaissances.

Quelle est la population actuelle du parc ? 86 loups à ce jour. De 5 sous-espèces : Pologne, Canada, Sibérie, Arctique, Mongolie.

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 Loup arctique (photo JBDumond)

Quelle est l’urgence selon vous en matière d’environnement et de nature ? Qu’est ce qui cloche ? Je n’ai pas toutes les connaissances écologiques. Mais je pense que l'un des problèmes est la surpopulation humaine. A un moment il faudrait se rendre compte qu’on ne peut pas être davantage sur la planète.

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Le loup l’a compris ! Dans une meute, un seul couple - le couple alpha - se reproduit. Car une meute a déjà du mal à nourrir la portée du couple dominant.

L’Homme ne voit pas plus loin que le bout de sa vie ! Il faut une prise de conscience mondiale. Pour mieux partager les richesses de la planète.

Si vous étiez un animal sauvage – la question est absurde je sais -, lequel ? Un loup forcément! Un loup noir. Je les aime beaucoup. Ils ne représentent que 12 à 15% de la population mondiale – principalement les forêts de conifères du nord Canada et de l’Eurasie. Pourquoi ce loup? Parce que ses yeux jaunes, sur le noir, ressortent encore plus et face à lui, en milieu naturel, il a un regard qui transperce, un peu comme si il pouvait lire en vous, comme un livre ; situation qu’on ne peut vivre avec un chien. Chez le loup, les yeux scintillent, pétillent.

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(photo JBDumond)

Le loup nous parle des origines ? Un peu comme le cerf quand il brame, oui !

Quel conseil à un jeune qui voudrait suivre votre parcours ? Etre passionné au départ. Ça ne se commande pas. La passion donne la sensibilité, pas la sensiblerie. Puis peut venir le temps de la science.

Je suis urbain d’origine et je ne suis pas issu d’un milieu naturaliste, mais je me souviens que petit, j’allais tous les weekends au zoo de Vincennes ou au Jardin des Plantes pour voir les loups. Avec passion.

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Pour conclure, vous disparaissez ce soir, quel message aimeriez-vous laisser ? J’espère toujours que les gens qui ont fait quelque chose d’important ne tombent pas dans l’oubli. C’est important que d’autres prennent la relève.

Que ça ne s’arrête jamais !

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vautours fauve (photo JBDumond)

 

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