Le courlis cendré faisait autrefois partie du paysage britannique comme le pigeon peut aujourd’hui faire partie du paysage parisien. Il pullulait. Mais les experts sont inquiets : l’oiseau au long bec incurvé est en danger. D’après de nouvelles estimations, les courlis pourraient bientôt disparaître en Grande-Bretagne et en Irlande à cause de l’agriculture intensive qui détruit leur habitat naturel (les zones humides et marécageuses).

Une étude* évalue ainsi le nombre actuel de courlis à 300 couples en Angleterre, 400 au pays de Galles et 500 en Irlande du Nord… En République d’Irlande, la population de cette espèce (Numenius arquata de son nom scientifique) a chuté de 96 % en seulement 30 ans : le nombre de couples d’oiseaux est passé de 12 000 dans les années 1980 à 138 en 2017. C’est comme si, dans le même pays, la population humaine passait de 4,78 millions d’habitants aujourd’hui à 191 000 en 2050.

« Si vous parlez des courlis aux anciens, ils vous diront qu’ils étaient omniprésents dans les fermes irlandaises, raconte le Dr Barry O’Donoghue du National Parks and Wildlife Service, l’auteur principal de l’étude, à The Independent. « Ils vous diront aussi que le chant du courlis [magnifique mais plaintif et presque lugubre, ndlr] leur rappelle la campagne ou le travail dans les marécages. À l’inverse, leurs petits-enfants ne l’ont peut-être jamais entendu. Nous perdons une partie de notre patrimoine culturel autant que notre patrimoine naturel », déplore-t-il.

Au XXe siècle, un mets apprécié dans les Cornouailles

Depuis plusieurs siècles, le courlis cendré est emblématique des collines et des vallées britanniques. Il était si commun au XXe siècle que de nombreux bouchers vendaient sa viande, et la tarte au courlis était un mets particulièrement apprécié dans les Cornouailles avant la Seconde Guerre mondiale.

La survie des courlis cendrés de Grande-Bretagne et d’Irlande est d’autant plus cruciale que les îles britanniques abritent à elles seules 25 % de la population totale de ces oiseaux nicheurs. La course contre la montre est engagée pour sauver les courlis. Heureusement, une prise de conscience semble opérer : à l’heure actuelle, des associations, des écologistes, des propriétaires terriens et des groupes communautaires travaillent de concert pour lutter contre la destruction de leur habitat.

Wader Study, 2019.

Source GEO