Trafic aérien: quel impact sur la banquise?

Chaque année, un passager d’avion, volant 2.000 kilomètres en moyenne, serait responsable de la fonte de 1,27 mètre carré de banquise arctique, selon une étude publiée dans Environmental International.

 

Né en Suède, le mouvement écologiste ‘Flygskam’, qui appelle à boycotter le transport aérien afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre, inquiète le secteur de l’aviation. Parmi les grands consommateurs de miles, figurent les scientifiques eux-mêmes, y compris les climatologues, régulièrement invités dans des conférences.

Depuis son lancement en 2017, le site «No Fly Climate Sci» regroupe ainsi 584 scientifiques, dont de nombreux climatologues, qui se sont engagés à ne plus prendre l’avion, ou à moins le prendre. C’est un nouvel appel à la communauté scientifique, appelée à recourir aux téléconférences, que l’équipe de Bjørn Munro Jenssen, biologiste de l’université d’Aarhus (Danemark) spécialisé dans les milieux arctiques, lancent dans leur étude.

0,424 TCO2 PAR AN ET PAR PASSAGER

Les chercheurs y calculent l’impact du trafic aérien sur la banquise arctique, et ce par quelques opérations des plus simples. Primo, le nombre de passagers, qui devrait doublier d’ici 20 ans, s’élève à 4,3 milliards par an, pour une distance moyenne de 2.000 kilomètres par an. Deuxio, les émissions annuelles de l’aviation s’élèvent à 1,82 milliard de tonnes de CO2, soit environ 2% des émissions anthropiques. Bilan: chaque passager émet en moyenne 0,424 tonne de CO2 par an, à son parcours moyen de 2.000 km.

Or selon une étude publiée en 2016, une tonne de CO2 engendre la fonte de 3 m2 de banquise arctique estivale -mesurée au mois de septembre, son minimum annuel. Par un simple produit en croix, un passager moyen entraîne donc la fonte annuelle de 1,27 m2 de banquise arctique par an.

1,35 MILLION DE TERRAINS DE FOOT PAR AN

Poussons le calcul: tout kilomètre parcouru équivaut à 0,212 kg de CO2 (c’est-à-dire 0,424 tCO2 divisé par 2.000 km). Un aller-retour Paris-New York, soit environ 10.700 kilomètres, émet donc 2,27 tonne de CO2 par passager, soit 6,81 m2 de banquise. Et pour les vacanciers du bout du monde, un aller-retour Paris-Bali (24.800 km) émet 5,26 tonnes de CO2, et fait fondre 15,78 m2 de banquise par passager.

Selon les chercheurs, les émissions annuelles de l’aviation équivalent donc à la fonte annuelle de 5.470 km2 de banquise, soit 1,35 million de terrains de football. Ou le territoire de quatre ours polaires dans la baie d’Hudson, au nord du Canada, zone où ces plantigrades sont parmi les plus menacés par le réchauffement. Question subsidiaire: combien de séjours à Bali peut-on se payer avec un ours polaire?

Le Journal de l’Environnement/Romain Loury; 24 janvier