QUELS SONT LES PREFERENCES DES FRANÇAIS ENTRE LES MOTS NATURE OU BIODIVERSITE ?

Plus de 30 ans après la naissance du terme de « Biodiversité, la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), France Nature Environnement (FNE), l’Association pour la  protection des animaux sauvages (ASPAS) et la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) ont souhaité savoir comment les français perçoivent ces deux notions en fonction de leurs profils socio-économiques et affinités politiques.  Et plus spécialement laquelle de ces deux notions représente le mieux, selon eux, la réalité des milieux naturels et des espèces. Les résultats sont riches d’enseignement.

Les termes de nature et de biodiversité arrivent à égalité de compréhension avec respectivement 49 et 51%. La marge d’erreur pour un échantillon de 1000 personnes est de 3%.

Certains considèreront que le terme de biodiversité a bien progressé puisqu’il est récent (on peut se mettre d’accord sur 92, RIO soit 30 ans), et que selon une étude TNS Sofres de 2010, 21% des français n’en avaient jamais entendu parler, et seuls 23% pensaient savoir de quoi il s’agissait (ça ne veut pas dire que les 50% aujourd’hui savent la définir).

Inversement, d’autres feront remarquer que depuis tout ce temps que le mot biodiversité est martelé dans les discours, celui de Nature reste encore à 50% ce qui est très haut.

Il est à noter qu’il n’y a pas de préférence marquée que l’on soit un homme ou une femme.

L’analyse sociologique est très intéressante.

Plus on est jeune, et plus on privilégie le terme de biodiversité : 55% des moins de 35 ans -dont 59% chez les 18-24- contre 50% chez les plus de 35 ans – et seulement 42% des plus de 65 ans ;

Les catégories professionnelles supérieures et professions intermédiaires privilégient le terme de biodiversité (56 et 59%) quand les catégories populaires préfèrent le mot nature (55% et jusqu’à 59% chez les ouvriers) ;

Le niveau de diplôme a également une incidence : les diplômés supérieurs choisissent la biodiversité à 64%, le 1ercycle 57, le niveau bac 54, CAP/BEP 42. Et inversement pour la nature de 36 à 58% ;

Les urbains privilégient biodiversité à nature (60/40) et plus ils habitent la campagne et plus ils privilégient nature jusqu’à un rapport 46% biodiversité/54% nature dans les communes de moins de 10.000 habitants ; en Ile de France le rapport est de 55% pour la biodiversité et 45% pour la nature ; il est équilibré en province (51/49).

L’analyse politique ne manque pas d’intérêt

Il n’y a pas de différence entre les sensibilités de droite et de gauche. Environ 60% biodiversité et 40% nature.  L’électorat d’EELV privilégie le terme de biodiversité à 71% contre 29% pour le terme de nature.  Pour la France Insoumise le rapport est de 67 contre 33.

La tendance s’inverse avec l’électorat de La droite radicale et du Rassemblement national dont 30% seulement privilégient biodiversité, contre 70% pour le terme de nature.

Pour Allain Bougrain Dubourg, Président de la LPO «Après plus de 30 ans, le terme de biodiversité n’a pas remplacé celui de nature. L’histoire de la protection de la nature donne sens à nos combats actuels.  Si les deux notions font jeu égal, chacune a son propre public. Le terme de « Biodiversité » est plus adapté aux publics déjà captifs de nos ONG. Tandis que « Nature » parle à des publics plus éloignés. Il nous revient d’utiliser les deux à bon escient. Les deux concepts sont désormais complémentaires ».

Pour Denis Couvet Président de la FRB « Pour les sciences de la nature, les différences entre nature et biodiversité sont importantes. Le terme nature est plus englobant ; il comprend la biodiversité mais aussi son environnement physique (minéral, eau, etc.). Cette enquête permet d’analyser les perceptions des publics, perception dont les sciences doivent, devront, tenir compte (notamment dans le cadre d’une gestion adaptative, en concertation avec les actrices et acteurs)».

Pour Arnaud Schwartz Président de FNE «L’appropriation relativement rapide du terme de biodiversité par les Françaises et les Français, notamment les jeunes générations, démontre une compréhension des enjeux et des menaces présentes. Mais les motivations pour passer à l’action varient d’un individu à l’autre. Ce sera le défi majeur de la nouvelle Stratégie Nationale pour la Biodiversité : trouver les bons mots, les actions concrètes capables d’emporter l’adhésion et la mobilisation de chacune et chacun ».

Pour Marc Giraud, porte-parole de l’ASPAS « Cette enquête confirme plusieurs travaux scientifiques sur « l’extinction de l’expérience de la nature » (R Pyle 1993) ou « l’amnésie environnementale générationnelle » (P Kahn 2002), qui constatent la disparition de la nature dans nos esprits, à chaque génération un peu plus. Moins nous sommes en contact avec le monde vivant non-humain, et moins nous sommes préoccupés par la nécessité de sa protection. La solution ? Favoriser les sorties nature pour les jeunes ».