…Scandale : Chronique d’un favoritisme éhonté

En 2020, 82,5 % des aides COVID ont été alloués à des navires équipés d’engins de pêche destructeurs. Ces navires représentent 22,1 % de la flotte française.

En 2020, 28,5 % des aides COVID ont été alloués à 53 navires appartenant à 7 groupes/entreprises. Ces navires représentent 0,8 % de la flotte française.

En 2020, 8,7 % des aides COVID ont été alloués à la petite pêche côtière. Elle représente 74,5 % de la flotte française.

Ces chiffres, extraits de l’étude de BLOOM sur les aides COVID publiée dans la revue scientifique Marine Policy, mettent en évidence la réalité : une allocation des aides publiques profondément inégalitaire permettant à une minorité d’acteurs de continuer à surexploiter et détruire le commun à coup de subventions publiques. Un favoritisme éhonté du gouvernement français envers un modèle industriel destructeur. Or, la sauvegarde de l’océan et notre capacité à faire face aux défis du 21ème siècle passent par un changement radical de la logique économique du secteur de la pêche. C’est pourquoi il est essentiel de comprendre la façon dont se structure ce favoritisme et la manière dont il est dissimulé. Les aides COVID sont, en ce sens, un cas d’école.

En effet, dès mars 2020, dans le cadre des discussions sur les aides à apporter au secteur de la pêche pour faire face à la crise du COVID, le gouvernement avait choisi de ne consulter que le Comité national des pêches, verrouillé par des acteurs de la pêche industrielle, et d’ignorer les demandes de la société civile quant aux conditions d’attribution des aides. L’arrêté qui s’en était suivi et qui dictait les conditions d’allocation des aides était un cadeau pour les industriels : aucun critère environnemental ou social pour accéder aux aides, une logique du “premier arrivé, premier servi” et, en prime, aucun plafonnement quant aux montants pouvant être perçus.

Mais pour que ce système puisse perdurer, le gouvernement et l’administration française doivent s’assurer que le financement du modèle industriel par les fonds publics se fasse à l’abri du regard de la société civile. Ainsi, aucune analyse publique n’a été produite par le Ministère de l’agriculture et l’administration française quant à l’attribution réelle des aides COVID. Seules les données brutes indiquant les subventions nominatives par navire ont été discrètement rendues publiques, comme l’oblige la loi européenne. Ce fonctionnement est la meilleure façon pour le gouvernement d’échapper à toute responsabilité et de masquer derrière de grands discours d’intention la réalité de l’utilisation des fonds publics.

C’est pourquoi, afin de sortir d’une logique dans laquelle une minorité mortifère choisit à notre place, il est primordial que la lumière soit faite sur l’utilisation de ces fonds publics et que la société civile s’empare enfin du sujet. Le travail de transparence que nous faisons depuis des années nous a permis de gagner des combats historiques. Notre étude sur l’utilisation des aides COVID s’inscrit dans cette même logique.

 

 

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