Au Kenya, le champion olympique David Rudisha parraine les « Olympiades masaïs » afin que le sport remplace la chasse au lion

La quatrième édition des « Jeux olympiques masaïs » s’est tenue samedi 10 décembre au pied du Kilimandjaro. 160 athlètes se sont affrontés sur des disciplines classiques de l’olympisme pour prouver que le sport peut remplacer le rituel d’entrée dans la vie adulte de la chasse au lion.

Il n’y avait pas que du foot samedi 10 décembre, il y avait aussi au Kenya les Olympiades Masaï, évènement dont le parrain est David Rudisha, 33 ans, double champion olympique du 800 mètres, et recordman du monde sur cette distance. Un champion qui insiste bien pour dire que dans ces jeux masaïs, il n’est pas juste question de sport et de performance, mais « de protection de la nature, si nous organisons cette compétition, dit-il à l’AFP, c’est pour protéger notre environnement et encourager les jeunes à s’engager et à se défier autrement. »

Stopper le déclin de la faune sauvage

« Se défier autrement« , parce que depuis des générations, la coutume masaï veut qu’un adolescent, pour prouver son courage et devenir adulte, tue un lion. Cette tradition s’appelle l’Olamayio, un rite de passage pratiqué depuis des siècles, mais que le déclin de la faune sauvage ces dernières années a fini par rendre complètement obsolète. Le Kenya est passé de 30 000 lions il y a cinquante ans à 2 000 aujourd’hui. La faute, disent les autorités, au mode de vie des humains : la bétonisation, la déforestation, le braconnage, la chasse.

Alors, en 2012, les chefs des tribus masaïs se sont réunis, cherché une solution pour endiguer ce déclin, et ils ont décidé de créer ces olympiades, en lieu et place du traditionnel rite de passage. Pour en faire la promotion, ils ont désigné l’immense champion masaï, David Rudisha, qui, lui, n’a pas eu à tuer de lion étant jeune précisément parce qu’il s’est lancé très tôt dans l’athlétisme. Dès l’adolescence, ses médailles ont prouvé son courage et ont clairement démontré qu’on peut être fort autrement, sans effusion de sang ni mise à mort.

Samedi, au pied du Kilimandjaro, 160 athlètes amateurs, 120 hommes et 40 femmes, ont donc enchainé les épreuves : sprint, 800 mètres, 5 000 mètres, lancer du javelot, saut en hauteur… Les disciplines phares de l’athlétisme que ceux qui traquaient les lions se devaient aussi de maitriser. La boucle est bouclée : désormais, la chasse aux médailles remplace celle aux grands fauves et Rudisha peut se targuer d’avoir décroché une belle victoire. « Le lion, c’est notre trésor, a-t-il lancé en clôture des jeux, il fait partie de notre héritage, de notre culture. » Ou comment dire à qui en douterait que, oui, on peut réinventer ses rituels et ses traditions sans se renier.