Comment un animal né dans un zoo peut-il être réintroduit dans la nature ?

Des programmes de reproduction gérés par les zoos permettent parfois de relâcher des animaux nés en captivité dans la nature.

Mercredi 5 janvier 2022, une loutre géante née au Bioparc de Doué-la-Fontaine (49) s’est envolée pour l’Argentine. Une première en France pour un animal de cette espèce menacée. L’objectif est qu’Arirahna, une femelle de sept ans, soit relâchée dans son milieu naturel en compagnie d’un mâle provenant d’un zoo suédois.

Un projet qui aura mis plus de 20 ans à aboutir. Pierre Gay, président de Bioparc Conservation, explique ainsi avoir eu l’idée à la fin des années 2000, pour les 40 ans du Bioparc, de soutenir des programmes de conservation gérés par les communautés locales. De nombreux voyages et rencontres ont abouti en 2005 à la création d’un programme d’élevage en Europe pour les loutres. Il n’y avait alors que sept individus dans les zoos européens, dont un seul mâle capable de se reproduire. En parallèle, le Bioparc a finalement accueilli son premier couple de loutres géantes en 2007, qui donnera naissance à plusieurs petits, dont Arirahna en septembre 2013.

« Finalement, il y a quelques semaines, nous avons été contactés pour envoyer notre loutre femelle en Argentine. C’est la concrétisation d’un travail et d’un engagement de 20 ans, donc je suis vraiment très content ! », confie l’ancien directeur du parc animalier.

Comment la loutre géante va-t-elle être réintroduite ?

Arirahna et le mâle suédois qui l’a rejoindra à Iberá, au cœur du plus grand parc naturel d’Argentine, ont été choisis par le coordinateur scientifique de l’espèce en Europe parmi toute la population de loutres géantes des zoos européens (environ 80 individus). Parmi les critères pris en compte : l’âge, la maturité, et la compatibilité génétique.

« Après une période de quarantaine effectuée à l’arrivée, Arirahna sera ensuite placée dans un enclos de pré-relâché de 800 m² avec le mâle, et dès qu’ils auront une portée, ils seront relâchés, pucés et équipés d’un émetteur radio », explique Pierre Gay. Là, au bord du lac Paraná, ils recevront quotidiennement des poissons vivants afin de mettre en pratique leurs techniques de pêche. Ils seront relâchés progressivement, et pourront retourner dans leur parc s’ils le souhaitent.

A noter qu’un premier couple de loutre géante a été réintroduit en 2019 et a eu plusieurs portées. Une bonne nouvelle pour cette espèce, considérée comme « probablement éteinte » en Argentine par l’UICN.

Toutes les espèces d’animaux peuvent-elles être réintroduites ?

Les réintroductions d’animaux nés en captivité ont pour objectif d’offrir un renfort de population, lorsqu’il ne reste que quelques individus à l’état sauvage, ou de réintroduire une espèce complètement disparue.

« Il existe deux critères fondamentaux pour savoir qui peut être relâché. D’une part l’espèce : est-ce qu’elle a besoin d’un apprentissage. Et ensuite l’individu : est-ce qu’il est imprégné ou non. Si c’est le cas, c’est très dur de désimprégner un animal, il aura besoin de l’homme toute sa vie », détaille Pierre Gay.

C’est pour cela, explique le spécialiste, que les premières réintroductions ont eu lieu avec des vautours. Ceux-ci ne consommant principalement que des charognes, ils ont juste à repérer les autres oiseaux qui tournent dans le ciel au dessus d’un cadavre, et se joindre à eux.

« Pendant très longtemps on a cru qu’on ne pourrait pas relâcher de grands félins, continue Pierre Gay. Ils savent chasser de façon innée. Même un chat domestique sait spontanément chasser. Le seul danger, c’est que les grands félins sont dangereux pour l’homme, et quand ils ont été à notre contact pendant des années, ils savent très bien que nous, nous ne sommes pas dangereux… et faciles à manger. »

Difficile donc, mais pas impossible. Une équipe russe est ainsi en train de mener un projet avec les léopards de Perse. « Ils ont récupéré des animaux élevés dans de très grands enclos dans des zoos européens, qu’ils ont mis dans des enclos encore plus grands. Leur intention est de relâcher leurs petits. »

Le principe est similaire pour les primates. Il s’agit de laisser vivre les individus en groupe social loin de l’homme, pour ensuite relâcher les générations suivantes. Le zoo de Beauval avait ainsi réintroduit deux de ses gorilles au Gabon en 2019.

Enfin, il faudra choisir avec soin l’endroit où les animaux seront relâchés, le bon moment, ainsi que la disponibilité en nourriture.

Source : CHLOÉ GURDJIAN / GEO, 6 janvier 2022

 

 

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