CONGRÈS MONDIAL DE LA NATURE : L’OCCASION POUR LA FRANCE DE METTRE FIN AU MASSACRE DES DAUPHINS

Début septembre, la France accueillera le Congrès mondial de la nature, à Marseille. Il s’agit d’un évènement incontournable qui réunit la communauté internationale autour des problématiques les plus urgentes concernant la conservation de la nature. Jusqu’à présent, la France a refusé d’agir face à une catastrophe qui se produit depuis des années au sein de son propre espace marin : l’hécatombe de dauphins et de marsouins, capturés par milliers dans les filets de pêche du Golfe de Gascogne. Hier, lors d’une réunion avec FNE et la LPO, le chef de l’Etat s’est engagé à examiner les conditions dans lesquelles une fermeture spatio-temporelle des zones de pêche avec indemnisation des pêcheurs pourrait être mise en place.   

Un gouvernement français trop longtemps sourd face au massacre des dauphins dans ses eaux

Depuis le mois de décembre 2020, plus de 800 dauphins et marsouins[1] ont été retrouvés échoués sur les côtes françaises de l’Atlantique et de la Manche, soit une estimation d’environ 8 000 morts au total, échoués et coulés. Au cours des 30 dernières années, ce sont plus de 100 000 dauphins[2] qui sont morts capturés dans les filets de pêche du golfe de Gascogne, avec une forte augmentation de la mortalité ces cinq dernières années.

« Lorsque ces animaux sont emprisonnés dans des filets des pêcheurs, ils meurent par asphyxie, dans une longue et douloureuse agonie. Nous sommes révoltés par cette souffrance animale qui se répète depuis 30 ans dans les mêmes lieux, aux mêmes périodes et avec les mêmes modalités de pêche » explique Allain Bougrain-Dubourg, Président de la Ligue pour la Protection des Oiseaux. Il faut ajouter que de nombreux dauphins ont été retrouvés éventrés sur nos plages, probablement pour que ceux-ci coulent au fond de l’océan, loin du regard des promeneurs.

Pourtant, le gouvernement français a jusqu’à présent refusé de suspendre les activités de pêche mortifères françaises[3], alors que cette suspension est recommandée par plusieurs organes scientifiques européens[4] et par le Comité scientifique de la Commission baleinière internationale[5]. La France a reçu une mise en demeure de la Commission européenne[6] ouvrant la voie à des sanctions par la Cour de justice de l’Union européenne. C’est le risque de voir infligé aux contribuables le paiement d’une amende plutôt que d’empêcher la mort, année après année, de milliers de dauphins et de voir ces espèces protégées disparaître[7] ?


[1] Données provisoires communiquées par l’Observatoire PELAGIS

[2] Etat des connaissances sur les captures accidentelles de dauphins communs dans le golfe de Gascogne – Synthèse 2019. Observatoire PELAGIS – UMS 3462, La Rochelle Université / CNRS, 23 pages.

[3] Entre 2015 et 2018, les chaluts pélagiques et filets maillants (les deux méthodes de pêche concernées par les captures) présents dans le golfe de Gascogne étaient à 97% des bateaux français. (Source: Global Fishing Watch et Marine Protected Area boundary data). Ces données sont présentées au sein de la carte « Devine où je vais pêcher »

[5] Rapport du Comité Scientifique de la Commission Baleinière Internationale, SC/68C, juin 2021

[7] Rapport du Comité Scientifique de la Commission Baleinière Internationale, Nairobi, Kenya, 10-23 mai 2019.

Enfin une solution ? 

Hier, lors d’une réunion avec plusieurs représentants d’organisation de protection de la nature et de l’environnement, dont la LPO et France Nature Environnement, le Président de la République a été alerté. La solution d’une fermeture spatio-temporelle des zones de pêche concernées, avec indemnisation des pêcheurs, solution qui conviendrait à la fois aux pêcheurs et aux scientifiques, a été proposée. Le chef de l’Etat s’est engagé à examiner cette solution pour la prochaine campagne de pêche. « Face à une érosion sans précédent de la biodiversité, il serait à la fois incohérent et insupportable que la France accueille le Congrès mondial de la nature et en même temps refuse d’écouter les scientifiques et laisse le massacre de dauphins se poursuivre sur son propre espace marin. C’est le moment d’agir ! » explique Elodie Martinie-Cousty, pilote du Réseau Océans, mer et littoraux de France Nature Environnement.

Après avoir alerté et saisi la Cour de justice de l’Union européenne (avec Seas at Risk, la Ligue pour la Protection des Oiseaux et 23 ONG européennes), France Nature Environnement a attaqué le gouvernement français en justice pour son refus de prendre des mesures de fermeture cet hiver dernier et de renforcer les mesures de suivi scientifique. France Nature Environnement, Seas at Risk et la Ligue pour la Protection des Oiseaux demandent une suspension des méthodes de pêche concernées par les captures, pendant 8 semaines, au cours de l’hiver 2021-2022, ainsi qu’une réduction d’au moins 25% des captures par an dans les 5 prochaines années.

« La France a échoué à plusieurs reprises à mettre en place des mesures pour empêcher la mort inutile de dauphins dans le golfe de Gascogne, alors que le droit européen l’y oblige. La Commission européenne ne peut pas rester les bras croisés alors que des milliers de dauphins sont tués chaque hiver », a déclaré Christine Adams, responsable de la politique de la pêche à Seas At Risk. « Afin de faire respecter la législation européenne et de maintenir les dauphins en vie, nous avons besoin de voir aujourd’hui des actions qui n’ont que trop tardé ».

 

POUR ALLER PLUS LOIN
Hécatombe de dauphins : action en justice contre l’Etat

Dossier sur la problématique des captures de dauphins dans les filets de pêche, vidéo-témoignage et pétition

Article du Groupe de recherche sur les cétacés : Mortalité par pêche en Gascogne : le vent a-t-il tourné cet hiver ?